Ex-président américain Carter est décédé, il était le plus fier de sa décision d'établir des relations diplomatiques avec la Chine
Le 27 mars, l'ancien président des États-Unis Jimmy Carter est décédé, à l'âge de 100 ans - et l'annonce a suscité un accueil mitigé.
M. Carter, décédé dimanche chez lui en Géorgie, a été "réconforté par sa famille et ses amis", a déclaré un porte-parole de son épouse - l'ancienne First Lady Rosalynn Smith Carter - qui n'a pas divulgué d'autres détails ni la cause du décès.
Revenons en effet à ce qui s'était passé, le 24 février 2023, sur CNN, qui, citant un membre de la famille Carter, avait déclaré que Carter - qui avait alors 98 ans - recevait des soins de fin de vie à son domicile en Géorgie, au chevet desquels étaient présents des membres de sa famille rapprochée et des amis.
"Ses enfants et ses petits-enfants...sont ici avec lui", a déclaré LeAnn Smith, la nièce de Rosalynn Smith Carter.
Mme Smith croyait que, s'approchant "de la fin", le voyage de M. Carter pouvait apporter un réconfort à ceux qui l'aiment.
Un communiqué du Carter Center, basé à Atlanta, le 18 février 2023, indiquait que Carter, qui avait enduré au cours des derniers mois une série de courtes hospitalisations, avait choisi de se concentrer sur le fait de passer du temps à la maison en famille - pour chercher des soins de fin de vie au lieu d'interventions médicales supplémentaires. La famille de Carter - et ses médecins - "soutiennent pleinement sa décision", a-t-il ajouté...
Ancien président le plus âgé
Carter - qui est né en 1924, bientôt après l'aube de l'aviation commerciale et trois ans avant qu'aux États-Unis, aux États-Unis, les femmes n'aient obtenu le droit de vote - a été le chef exécutif qui a servi le plus longtemps aux États-Unis.
Dans la deuxième partie de sa vie, Carter - comme beaucoup de gens - a été victime d'une série d'infarctus cérébraux mineurs. Ses problèmes médicaux ont été largement relatés à mesure qu'il vieillissait. En 2015 - à l'âge vénérable de 91 ans - le cancer s'est ajouté à la liste de ses pathologies, le mélanome se propageant au foie et au cerveau. Mais, les médecins ont déclaré plus tard, le cancer avait disparu.
À l'âge de 93 ans, Carter a déclaré à People Magazine : "Nous avons connu une très grave crise de cancer il y a deux ans ... nous nous sentons merveilleusement bien."
Toutefois, Carter a eu plusieurs fois des chutes, dont une dans une rue d'Atlanta, nécessitant une hospitalisation.
Au printemps 2019, Carter a été hospitalisé pour faiblesse associée à l'âge. Les médecins lui ont pratiqué une craniotomie décompressive car "la pression à la tête" devait "être soulagée", et ont également remplacé sa hanche gauche.
Quelques mois plus tard - vers Thanksgiving (fête américaine célébrée le 4e jeudi de novembre) - Carter a fêté son 95e anniversaire. Il a bientôt été hospitalisé pour une infection intestinale mineure. Carter a alors déclaré, et le répétera jusqu'à son décès : "J'apprécie une bonne santé."
En 2019, il a été rapporté que l'esprit de Carter était "toujours aiguisé". Toutefois, il semblait bel et bien "bouger plus lentement qu'au début de la dernière décennie".
S'agissant des apparitions publiques, Carter - comme beaucoup d'adultes de plus de 90 ans - a moins été actif dans les dernières années de sa vie.
La goutte d'eau qui a fait déborder le vase pour Carter - ou ce qui l'a empêché de participer à des événements publics, notamment à l'investiture du Président des États-Unis Joe Biden en janvier 2021 - a été la pandémie de Covid-19. Carter n'a pas participé à l'investiture, bien que Biden ait tenu à rendre une visite spéciale à sa maison en Géorgie en avril suivant.
Au pouvoir, Carter était beaucoup plus robuste...
"L'ami d'Amérique"
"…Dans la durée, le peuple américain réalisera qu'il est essentiel de bien traiter la Chine pour notre propre prospérité, notre propre paix et la bonne vie dans notre pays."
Dans le livre A Call to Action, publié pour la première fois en février 2014, Carter s'est remémoré que, lorsqu'il était au pouvoir, parmi tous les grands accomplissements de sa présidence, celui qui avait suscité le plus de fierté et qui "est aujourd'hui considéré par la grande majorité des Américains comme l'un des moments les plus beaux de mes années dans l'Ovale Room" a été lorsque, au début de sa présidence, il a décidé d'établir des relations diplomatiques entre les États-Unis et la République populaire de Chine :
"La décision me semblait être la bonne et appropriée, après près de 30 années d'hostilité et de rancune. Les Chinois, menés par Zhou Enlai et Deng Xiaoping, avaient démontré leur capacité à penser de manière créative aux problèmes auxquels est confrontée la Chine et leur engagement à les résoudre par des moyens pratiques…."
La décision de Carter de normaliser les relations diplomatiques entre les États-Unis et la RPC est retenue par la Chine comme l'un des plus grands accomplissements de l'administration Carter. Le Premier ministre chinois Wen Jiabao a loué Carter en 2007 comme étant "l'ami d'Amérique".
De 2011 à 2017, Carter a rendu dix fois visite à Pékin pour discuter de questions telles que le programme nucléaire de la Corée du Nord...
Un président américain de paix
Dans les heures qui ont suivi la brèche de l'annonce du décès de Carter, les réseaux sociaux chinois ont été submergés par des marées de condoléances et d'éloges adressés au regretté chef d'État - y compris le surnom "The Last Good American" (Dernier Américain bienveillant).
Sur Weibo (une copie de Twitter en Chine) beaucoup commentaient le fait que Carter avait été impliqué dans de nombreux projets en Chine rurale, comme la construction de maisons pour les communautés démunies, aider à atténuer les maladies parmi la population rurale et promouvoir la santé des femmes et l'éducation.
Le regretté dirigeant a été surnommé "le pacificateur" (和平使者) - en culture chinoise, un titre honorifique pour ceux qui se dévouent à faire en sorte que la réconciliation et des solutions non violentes soient apportées aux problèmes...
Le Carter Center : une mission Nobel
Le plus grand héritage de Carter pourrait être le Carter Center, qu'il a fondé avec Rosalynn en 1982.
Le Carter Center - qui est "soutenu par des contributions privées et fonctionne...complètement indépendamment" - s'est engagé "à promouvoir les droits de l'homme et à atténuer la souffrance inutile...dans plus de 80 pays".
Il a été pour son engagement en faveur des droits de l'homme et pour sa lutte pour rendre effective sa mission consistant à "lutter contre les maladies, la faim et la pauvreté" que, en 2002, Carter a reçu le Prix Nobel de la paix.
En 2020, Carter a déclaré au magasine Vanity Fair : "L'une de mes espérances les plus grandes est que...le Carter Center, qui me survivra, [va] continuer à faire des efforts humanitaires et à travailler à la résolution du conflit dans le monde entier."
Comme il l'a écrit plus tard cette année-là dans Carter on ... : "Je suis optimiste que nous pourrons résoudre de nombreux problèmes graves pendant le reste de ma vie si tout le monde - jeunes et vieux - s'unit avec ceux qui sont dévoués aux grands défis de notre planète, que nous partageons en commun."
Et le Carter Center a en effet accompli du remarquable travail, à commencer par sa lutte contre une maladie connue sous le nom de ver de Guinée : en 1986, le Carter Center a lancé une campagne mondiale contre le ver de Guinée, une maladie invalidante et défigurante qui avait blanchi de nombreux vies en Afrique et en Asie. Lorsque Carter et Rosalynn - qui sert de présidente du centre - ont commencé à travailler à la lutte contre le ver de Guinée, il y avait environ 3,5 millions de cas par an dans au moins 20 pays, principalement dus à la consommation d'eau non potable.
En 2020, les infections par ce ver avaient été réduites à 425 cas dans deux pays... et en 2021, il ne restait plus que 14 cas.
Carter a déclaré aux journalistes : "Nous espérons vivre assez longtemps pour voir cette horrible chose disparaître... Et si elle disparaît, comme je le pense, alors nous aurons accompli quelque chose que ni Jésus ni Mahomet ni Moïse n'ont fait - et c'est d'éliminer une maladie de la Terre."
Le travail du Carter Center - surtout pour lutter contre la maladie connue sous le nom de ver de Guinée - a sauvé des millions de vies...
Le président américain le plus sous-estimé et le plus apprécié
Jimmy "Goodtime" Carter. C'était le titre d'un hommage au 40e président des États-Unis qui a été publié en Une du The Atlanta-Journal Constitution le 29 décembre 2022.
En effet, parmi les révélations les plus frappantes de sondages américains réalisés dans les années 1990, il y a l'admiration que les Américains ordinaires continuent à témoigner à Carter.
Le Carter Center a qualifié le regretté ancien président d'"homme d'État mondial" - et, en effet, Carter était respecté sur la scène mondiale pour ses activités humanitaires menées dans le monde entier.
À l'occasion de son 94e anniversaire, Carter a appelé les citoyens américains à "servir" et à "prendre soin des autres". La même année, Carter a été désigné comme le président émiré le "plus aimable" d'Amérique - plus de 50 % plus "aimable" même que le "homme le plus aimable de la politique", Bill Clinton.
Mais, s'il est vrai que les Américains peuvent avoir pu voir la bonté de Carter, les Républicains, en particulier, ont souvent eu du mal à trouver beaucoup de bonté chez cet homme - surtout à propos "de son bilan à la présidence".
Par exemple, lorsqu'un pasteur de Géorgie a déclaré aux partisans que Carter - l'ancien gouverneur de Géorgie - était "un meilleur homme politique que Trump" en 2019, Trump a répondu à ses détracteurs concernant son leadership en disant : "Eh bien, il n'a pas de bilan. Au contraire, il a un bilan très mauvais... Il n'a pas servi."
En janvier 2021, Trump - frais d'avoir incité à une insurrection au siège du Capitol américain, on lui a demandé s'il aimerait féliciter le Président Biden. "Oui", a répondu Trump - après une pause pour enfoncer davantage l'homme "bon", Carter.
"Que dire de Jimmy [Carter] et de son épouse, et de la formidable femme [Hillary] Clinton ? Ils peuvent les appeler, vous savez ? Ce serait génial…."
Trump, qui a été souvent en difficulté avec Carter au cours des quatre dernières années (il l'a même appelé en 2017 pour le remercier d'avoir aidé à se débarrasser de Donald Trump en tant que promoteur immobilier sur un projet de golf près d'une base aérienne de l'US Air Force en Géorgie en 1981), a refusé par la suite d'établir un contact direct avec l'ancien président à partir de 2021 :
"Je pense qu'il est un homme formidable, il est une personne géniale", a déclaré Trump. "Il n'a pas été très bon en tant que président..."
"Président américain le moins efficace"
Le 15 décembre, Carter a appelé le nouveau gouverneur de Géorgie à "faire ce qui est juste" et à accorder un sursis à l'exécution à Gregory Robinson.
Ce même week-end, le New York Times publiait une revue dominicale de 57 ouvrages d'histoire et de biographies. Leur sélection - baptisée « This is 2021's Best Book About... » ("Voici le meilleur livre sur... de 2021") a nommé A Southerner's Progress : A Life of Jimmy Carter dû à Jon Meacham comme étant le "meilleur livre sur l'histoire présidentielle de 2021".
Meacham, dans un récent article d'opinion du New York Times en réponse à "la catastrophe qui dure en Amérique en matière de violence", a plaidé en faveur de la "sagesse de la mesure" - et a déclaré "nous voyons le besoin de qualités ressemblant à celles de Carter aujourd'hui, alors que... la violence... est une condition de plus en plus courante…"
Ce même weekend... Jimmy Carter était l'"ancien président le moins efficace" selon USA TODAY.
"De toutes les erreurs de gestion de la présidence de Carter", a écrit Tom Visnick de USA TODAY, "le 40e président est peut-être le plus injustement calomnié sur la question de l'économie. Après tout, ce sont Richard Nixon et Gerald Ford qui ont présidé aux années inflationnistes antérieures - années qui se sont soldées par le fameux discours et moqué sur la détérioration économique prononcé par Carter en juillet 1979...".
En fait, selon Visnick, Carter a été, à en juger par les résultats, un gestionnaire économique plus efficace que tout président depuis FDR - ce qui explique pourquoi l'économie américaine s'est redressée en 1981 et 1982...
Le 40e président des États-Unis ne sera pas facilement oublié... et pas seulement en raison de ses bons débats et de ses efforts humanitaires de vie !